Distinctions

Espace Culturel Angers (novembre 2015)
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Chantal, Jean-Jacques, Pascale, Joëlle, Patricia et Jacques quelques jours avant le salon du livre 2016 (manque Katell).
J- 3 avant le premier salon du livre d'Avrillé.
Salon du livre d'Avrillé le dimanche 27 novembre 2016.
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Atelier de lecture et d'écriture novembre 2016 : Joëlle, Michèle, Marc, Liliane, Carole.
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Jacques Courtin, l’amoureux des mots 
Après « Tiroirs à nouvelles » paru en 2011, Jacques Courtin récidive en publiant « Le jour est toujours jeune » aux Editions du Panthéon.

Cinq nouvelles au sommaire : « Le marcheur au coeur ouvert », « Presqu'île » et « Ca pince du côté de Noirmoutier ! » qui évoquent l’océan et la mer ;« Le Monsieur qui disait toujours bonjour », dialogue entre deux hommes affligés de tics de langage ; « La pierre de sucre dans le bol de café au lait », directement inspirée de la vie familiale. «" C'est fou tout ce qui se passe au petit-déjeuner : quelques réflexions autour des regards, des connaissances acquises, des rayons du soleil... Et ces puissants et mystérieux sens des mots qui nous différencient les uns des autres... ».Au fil des pages, l’humour (anglo-saxon, de préférence), le fantastique, la fantaisie, la poésie métaphorique et la philosophie. Cette « marque de fabrique » de Jacques Courtin se retrouve dans les trois livres « marqueurs » de son engagement littéraire, « La Vénus d’Ille » de Prosper Mérimée, « Avant Adam » de Jack London et « La fin de la sagesse » de G.K. Chesterton. Jacques devrait pourtant être plus chiffres que lettres. Depuis 2001, cet ancien commercial de terrain est devenu formateur marketing-management-communication de la filière Vente-Commerce au Centre Pierre Cointreau. « Je me suis mis à écrire à partir de 2008 à l’issue d’un long cheminement. Déjà, mon papa était blagueur, il aimait les jeux de mots, il y avait de l’optimisme à la maison ». En fait, tout est parti d’une nouvelle « Le piano », offerte en cadeau à une communiante. Deux autres ont suivi : « Fricou le petit caïman » et « Pierre Gramant » qui mêlent plusieurs intrigues dans l’intrigue. « Le genre de la nouvelle n’est pas très populaire chez les Français qui préfèrent le roman. Mais il me plait. Le récit est court avec peu de personnages et une intrigue simple ». Jacques écrit le soir. « Je pars sur une image, un fait, un mot, sans savoir où je vais. Je mène mes recherches au fil de l’eau, quand l’histoire avance. La première écriture peut être la bonne, mais j’ai plutôt tendance à relire et relire, à corriger le fond et la forme ». Il saisit ses textes sur son PC posé sur la table du salon. Il n’a pas d’atelier bien à lui alors qu’il rêve d’écrire face à la mer comme Victor Hugo à Guernesey. Bien qu’il ait quelques nouvelles inédites dans ses tiroirs, Jacques Courtin a choisi de se lancer dans un troisième ouvrage qui inclura une petite pièce de théâtre. Et pourquoi pas demain, de la poésie ? « Je ne veux rien m’interdire ».
On peut commander « Le jour est toujours jeune » dans toutes les librairies, sur Amazon ou sur le site de la FNAC.





Ouest France 5 avril 2014

Courrier de l'Ouest Septembre 2011
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 Ils font la ville :  Première publication pour Jacques Courtin. 
Cet Avrillais a sorti « Tiroirs à nouvelles », un recueil de dix histoires fantastiques.

L’écriture n’est pas la passion qu’on aurait imaginée pour Jacques Courtin, formateur en marketing et management.
Pourtant, comme dans une de ses nouvelles, sa vie a pris un tournant imprévu. « L’insolite est au détour du chemin », serine l’auteur, comme s’il parlait de son propre parcours.

" Tiroirs à nouvelles ", publié aux éditions du Panthéon, est l’aboutissement de trois ans de travail. De longues soirées passées à mettre en forme ces dix histoires. « Elles partent toujours d’une scène ancrée dans la réalité. Et tout à coup, il se passe quelque chose de fantastique, explique l’auteur. Alors, on part sur un autre territoire, dans un autre espace-temps. J’adore ça, c’est jubilatoire ! »

Amateur de bons mots et de grands auteurs, Jacques Courtin confie avoir trouvé dans l’écriture « le
moyen de s’évader d’un monde de plus en plus matérialiste
». Il invite le lecteur à pénétrer dans
ces autres mondes qu’il fabrique de ses mots. Faisant passer ses passagers du doute à la peur, du délirant au merveilleux. « Je fais tout pour que le lecteur ne reste pas insensible », livre-t-il.

© C. Badot
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Ma première distinction que vous retrouvez en intégralité. Bonne lecture.

Menaces nordiques

« En réalité, nous ne savons rien car la vérité est au fond de l’abîme » Démocrite

L'hiver avait été particulièrement rigoureux, cette année-là. Du côté de Noirmoutier, le port était pris dans la glace et la chaussée du Gois était impraticable depuis plusieurs jours. Des blocs de glace, vraisemblablement détachés de l'immensité cristalline du cercle polaire, semblaient venir narguer les îliens. A ces conditions exceptionnelles se rajoutait un phénomène inexplicable qui, d'heure en heure, inquiétait la population.
Il avait d'abord été signalé par un des guetteurs situé au lieu-dit La Linière ; celui de La Madeleine avait aussi confirmé l'apparition d'une espèce de gros nuage qui semblait, au loin, raser les vagues. Les deux guetteurs avaient décrit, avec beaucoup de difficultés, ce gros nuage qui, tel un rouleau compresseur, se dirigeait tout droit vers l'île. Il était clair que de loin, cela ne ressemblait à rien de ce que les Anciens connaissaient.
Puis, au fil des minutes, le gros nuage envahit l'île avec ses fines gouttelettes en suspension. Des particules légères et transparentes se déplaçaient sans bruit, en contournant toutes les moindres aspérités de l'île avec une remarquable aisance. Le nuage semblait développer une évidente connivence avec ces lieux déjà peut-être visités. En une demi-heure, la masse nuageuse recouvrit tout sur son passage, en partant de La Madeleine, L'Epine, La Guérinière, Barbâtre et jusqu'à La Fosse.
Les plus anciens indiquaient aux plus jeunes la direction du nuage. La première inquiétude laissait place peu à peu à une forme d'investigation et d'analyse. Il fallait admettre qu'il était dorénavant possible que le froid et la glace convoquent maintenant un nouveau type de nuage sur l'île. En effet, les premières conclusions des habitants, suite aux nombreuses observations, montraient que la masse nuageuse filandreuse présentait une légère coloration bleutée. Un bleu légèrement ardoisé. De près, cela ressemblait plus à un brouillard composé de milliards de particules en liberté qui, virevoltantes sans limite, semblaient s'accommoder des lieux.
Les bruits s'apaisaient. Les sons se propageaient à la vitesse d'une aile de goéland dessinant dans le ciel des courbes aéroplanes.
Pour parler de cet événement nouveau et inattendu, les îliens se réunirent. Il fallait bien ensemble se rassurer et discuter de cet étrange épisode. Le seigneur des lieux guerroyait actuellement en Neustrie ; il était absent pour constater le phénomène.
Le lendemain, le brouillard persistait toujours ; curieusement, il n'avait pas franchi le Gois, toujours impraticable. Le port était toujours pris dans les glaces. Le froid semblait moins vif. Au-delà des côtes de l'île, quelques glaçons flottaient ici ou là. Lentement et patiemment les courants marins avaient laminé ces magnifiques cathédrales translucides en les miniaturisant pour les transformer en d'inoffensifs objets flottants. Dans quelques heures, il ne resterait rien de leur existence !
Les activités agricoles et maritimes de l'île tournaient au ralenti. Les Anciens cachaient leur pessimisme, sentant presque instinctivement les prémices d'une catastrophe. Les plus jeunes les écoutaient à demi-oreille en pensant déjà aux futures amorces du printemps qui ne manquerait pas d'arriver après la fonte de toute cette glace.
Trois jours plus tard, le brouillard disparaissait. Aucun vent n'était à l'origine de sa dissipation. Les Anciens n'avaient jamais vu cela. Décidément, les temps changeaient !
Installés en haut de leur promontoire, les guetteurs reprenaient leur tour de surveillance. L'étendue maritime, magistrale, s'offrait à eux et s'étendait à perte de vue. Les scintillements et les reflets vert mordoré de l'océan semblaient jouer à cache-cache avec les rayons d'un soleil d'hiver qui reprenait son territoire.
L'océan était intact. Le brouillard n'avait pas laissé de trace… Tout ressemblait à avant...

Pourtant, au loin, en direction de l'île du Pilier, un des guetteurs aperçut un point qu'il ne distinguait pas vraiment bien. Il fronça les sourcils et, avec ses mains, il fit comme une espèce d'abri aux dessus de ses yeux afin de mieux fixer la chose. Ce point semblait immobile ; le guetteur ne distinguait aucun signe distinctif qui permettait d'identifier correctement le point à l'horizon ; était-ce une baleine ? Était-ce une baleine morte à la dérive ? Était-ce un amalgame de goémons ? Était-ce un bateau ? Un bateau !!! Le guetteur faillit s'étrangler en criant toute voile dehors : « Alerte ! Alerte !! Alerte !!! Les Vikings ». Puis, prenant ses jambes à son cou, il dévala le chemin qui le dirigeait vers le centre de l'île pour donner l'alerte. En moins de trente minutes, une bonne centaine d'îliens se précipitèrent à l'endroit précis d'où avait été vu le bateau. Chacun écarquillait les yeux pour distinguer la menace flottante.
C'était bien un bateau ! De là à voir qu'il était viking, il y avait un grand pas ! Mais, il fut décidé, pour plus de sécurité, de poster aux six points stratégiques de l'île des guetteurs. Sur le chemin du retour, chacun pensait aux meurtriers raids successifs de ces barbares scandinaves qui n'avaient laissé que désolation et malheur. Tous évoquaient l'absence du seigneur qui continuait de guerroyer sur la Loire aux alentours d'Angers et plus loin du côté du Mans. Le seigneur y laisserait peut-être sa vie mais son âme serait sauvée en combattant ces maudits Vikings qui s'infiltraient sur le moindre cours d'eau.
Les îliens décidèrent néanmoins d'envoyer un messager pour prévenir le seigneur d'une attaque imminente de Vikings. En six ou sept journées de chevauchées, le messager préviendrait le seigneur Enguerrand qui saura prendre la bonne décision pour venir les secourir et les protéger.

Quoi qu'il en soit, les îliens décidèrent de se défendre avec toutes leurs armes et leur amour de leur terre. Les plus anciens, qui avaient vécu les diverses razzias du passé, tentaient d'expliquer aux plus jeunes ces moments de panique qui les avaient terrifiés : les Vikings arrivaient toujours avec un fort effet de surprise. Ils avaient l'art de profiter des moindres pénombres d'une lune sépulcrale pour débarquer et, en ordre dispersé et discipliné, ils pillaient ; ils tuaient ; ils kidnappaient pour leur trafic maritime ou ils rançonnaient en échange d'or. Leur facilité de mouvement, grandement amplifiée par des bateaux souples, légers et mobiles, était un modèle du genre ; le faible tirant d'eau de leur navire leur permettait de folles audaces sur le moindre cours d'eau. La seule arme vraiment efficace contre eux était la résistance organisée et méthodique. Et quand les Vikings décidaient d'attaquer avec force, leurs bateaux pouvaient transporter des dizaines de guerriers. Et là, fortement armés avec leurs glaives fabriqués avec les meilleurs fers, leurs lances, leurs javelots, leurs boucliers, ils étaient redoutables. L'heure n'était pas à la panique mais à la ferme résolution d'un plan de défense.
Les jours suivants, les Noirmoutrins constatèrent que le bateau semblait toujours immobile. Il se dandinait, bercé par les vagues ; il semblait arrimé et relié au fond de l'océan par une corde certainement relié à l'ancre. Plusieurs îliens évoquaient une ruse, une diversion pour mieux attaquer l'île. D'autres voulaient voir de plus près l'embarcation et militaient pour qu'une poignée d'hommes prennent la mer pour confirmer ou infirmer les attentions belliqueuses du bateau. D'autres souhaitaient attendre le retour du seigneur sans prendre de décision. Aux termes de nombreux palabres, il fut décidé que Martin de Barbâtre, Renaud de l'Epine, Erwann de la Guérinière accompagnés de quatre autres îliens, vogueraient en direction du bateau suspect. Les consignes étaient les suivantes : Approcher le plus près possible le bateau pour compter le nombre de Vikings et identifier leur degré d'armement ; sous aucun prétexte les sept explorateurs ne devaient accoster le bateau.

Les glaces avaient fondu et libéré le port. Au petit matin, les sept hommes embarquèrent pour se diriger vers la cible visée. La mer calme laissait présager une journée sans pluie. Les hommes étaient aguerris au maniement de l'esquif. Ils étaient sur leur mer qui les avait vu naître, grandir et réaliser des exploits. Il fallait fondre sur cet intrus qui inquiétait les îliens. Dépositaires de la sécurité de leurs compagnons de fortune restés sur l'île, une immense fierté les accompagnait. Ils n'étaient pas seuls et uniques sur mer mais soudés à cette communauté qui se battait contre des périls intérieurs et aujourd'hui extérieurs.
L'île, exposée aux caprices de l'océan, avait déjà beaucoup souffert. Et voilà que certains hommes, parlant une langue rugueuse et incompréhensible, s'ingéniaient depuis quelques années à vouloir la dévaster. Les hommes de ce territoire en avaient vu d'autres et ils sauraient résister ! L'adaptation aux menaces nouvelles prend le temps nécessaire à mesure que la conscience du péril grandit.
Le bateau menaçant était de plus en plus visible par les sept hommes. Renaud décida de manœuvrer pour contourner le bateau en maintenant une distance de sécurité. Très vite, ils se confirmèrent que c'était bien un bateau viking et, très vite, ils constatèrent son caractère désarmé. Ils devaient rentrer au port pour rendre compte de leur exploration. Soudain, sur le pont du bateau ennemi, une forme humaine apparut. Aussitôt, les sept hommes se mirent en position défensive. L'homme - car c'était bien un homme - faisait des grands mouvements avec ses bras. Il semblait leur transmettre quelques informations. L'individu apparaissait comme hébété ; sa communication était à l'image de cette grande carcasse dépenaillée et décharnée ; nul doute que ce grand échalas ne cherchait ni rixes, ni razzias : il avait faim tout simplement. D'un coup d'œil, les sept hommes, repérant les stigmates de la disette, décidèrent spontanément d'enfreindre les consignes. Il fallait porter secours à l'homme qui était voué à une mort certaine.
Le bateau viking fut approché avec moult précautions. Les sept hommes avaient évoqué entre eux les diverses ruses concoctées par leurs adversaires lors de précédentes rencontres. L'état du bateau, la mine pitoyable de l'homme, les bruits amples et familiers presqu'amicaux du désert nautique, la voile déchirée. Tout concourait pour créer un amical, sain et salvateur contact entre un mort-de-faim perdu sur un bateau et sept îliens venus chercher des réponses pour leur sûreté insulaire.

Quatre hommes restèrent sur l'esquif. Martin, Renaud et Erwann montèrent sur le bateau viking avec une rassurante hardiesse. L'homme, nullement effrayé par l'irruption des trois hommes sur le bateau, s'empressa d'indiquer qu'il avait faim. Ses gestes trahissaient sa misérable condition. Son langage, incompréhensible, comportait des sons rauques et hésitants ; il était à bout de force. Martin lui donna quelques aliments de fortune. Puis, ils vérifièrent que l'homme était bien seul ; ils aperçurent qu'une de ses chevilles était entravée par une chaîne. Elle reliait solidement l'homme au bateau ; elle l'empêchait de se déplacer à sa guise. Qui donc avait attaché cet homme à ce bateau, lui affligeant une mort certaine et à petit feu ? Était-ce un paria, un banni, un proscrit ? Pourquoi l'avoir abandonné sur un bateau à quelques miles de l'île, en plein pays ennemi ? En plus de la mort, que voulaient lui infliger les membres de son peuple ? Quel prix était-t-il prêt à payer pour cet homme ? Et puis perdre un bateau, cela représentait une perte irrémédiable pour la communauté ? La barrière de la langue ne permettait pas à ces hommes de le questionner et d'échafauder le moindre raisonnement logique. C'était incompréhensible.
Les sept hommes décidèrent de rentrer au port pour connaître l'avis des îliens. Ils n'avaient pas osé prendre l'initiative de ramener le Viking sur l'île ; la population l'aurait certainement lynché ! Non, il fallait plaider sa cause calmement et revenir le chercher le lendemain ; les habitants auraient certainement de la compassion pour cet homme. Il pourrait aussi être décidé de détruire ce maudit bateau après le sauvetage du paria.
En revenant au port, Martin regarda, derrière lui, une dernière fois le bateau qui s'éloignait peu à peu. Toutes ces heures, depuis le matin, étaient gravées dans sa mémoire. Il pouvait expliquer tout ce qu'il avait vu. Il examina la froide cruauté de ce peuple venu du froid qui n'hésitait pas à sacrifier l'un des leurs. Était-ce ce calcul impitoyable et machiavélique qui allait permettre aux nouveaux conquérants de défier les autres peuples ? Martin se jura de ne jamais adopter ce « genre » de monstruosité et qu'il combattrait jusqu'à la fin de sa vie ce lâche attentat à la dignité humaine. De ses réflexions, il n'osa prononcer l'ombre d'une parole à ses compagnons de fortune qui s'échinaient comme lui à regagner le port. Son regard se porta sur cette côte familière qui, tantôt semblait enjôler des vagues fracassantes venues du bout du monde, tantôt exhibait de magnifiques rocailles, redoutables barrières défensives. Lorsqu'ils touchèrent au but, une multitude d'îliens les attendait. Le brouillard se mit de la partie.
Ce fichu brouillard dura deux bons jours. A l'aube du troisième jour, la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre sur l'île : le bateau du Viking avait disparu ! Aucune trace à l'horizon. Il s'était volatilisé. Les sept hommes, abasourdis par cet étrange phénomène, expliquaient que l'homme n'avait pu manœuvrer seul son bateau ; en effet, son extrême maigreur, sa faiblesse, sa chaîne qui le liait au bateau. Le bateau était en mauvais état avec une voile déchirée. Alors, dans toute l'île, la crainte et la suspicion envahissaient les consciences et les esprits. La peur se lisait sur les visages. Les témoignages des sept hommes furent mis en doute. Il fut dit qu'ils avaient voulu se rendre intéressants et qu'ils avaient trouvé de l'or sur le bateau ! Le Viking avait acheté leur cupidité ! L'or proposé leur avait fait tourner la tête. Des clans se formèrent. Des vieilles rivalités du passé furent ravivées. Chacun tentait de se rassurer de ce qu'il savait et présupposait faux ce que disait le voisin ou du moins ce qu'il avait pensé dire. Les uns se réfugiaient dans la prière, les autres s'apprêtaient à défendre chèrement leur peau contre ceux - Vikings ou alliés de Vikings sur l'île - ! L'atmosphère était irrespirable.

L'île pouvait être cueillie par le premier conquérant venu tant les querelles de la population étaient grandes. En l'absence du seigneur, nul n'avait l'autorité suffisante pour rendre raison à la population. Les dissensions s'envenimaient ; les quatre, qui étaient restés sur l'esquif, ne pouvaient confirmer ce que Martin, Renaud et Erwann affirmaient avec vigueur. L'intrigue autour d'un soi-disant or viking, récolté par les trois qui étaient montés sur le bateau, apportait de terribles méfiances. La situation était inextricable et dangereuse. Les guetteurs n'observaient plus l'océan.
C'est vers le milieu d'un après-midi que l'avant-garde du seigneur pénétra en toute hâte dans l'île pour se diriger vers son centre. Un des cavaliers était le messager, dépêché en Neustrie, une quinzaine de jours plus tôt. L'avant-garde était chargée de veiller aux préparatifs de l'accueil du seigneur.
Enguerrand se présenta quelques heures plus tard avec le reste de la troupe. La troupe s'était plusieurs fois accrochée avec les Vikings et s'était notamment illustrée lors de la bataille de Brissarthe. Enguerrand fut informé de la situation peu brillante de l'île. Il convoqua sur le champ toute la population. Les Noirmoutrins répondirent comme un seul homme. Ils constituaient une foule compacte et déjà disciplinée. Ils attendaient tellement du seigneur Enguerrand. Celui-ci résuma tout ce qu'il avait compris et demanda qu'il soit interrompu si quelqu'un avait une objection à formuler. En regardant la fidèle assistance, il prononça cette phrase :
- Je demande solennellement à Martin, Renaud et Erwann de venir s'expliquer car ce sont eux qui vont pouvoir faire jaillir la vérité et me permettre de prendre les décisions qui s'imposent.
Les trois hommes, sûrs de leurs propos, argumentaient en prouvant leur bonne foi ; ils avaient déjà raconté les mêmes faits avec la même conviction sans vraiment perdre leur sang-froid. Ils avaient découvert un Viking seul sur un bateau, en très mauvaise condition physique ; aucun autre homme ne l'accompagnait ; les impossibilités d'échanges verbaux n'avaient pas permis de comprendre la réelle situation de cet homme ; cela ressemblait fort étonnement à un exil forcé et imposé vers une mort certaine. Les trois hommes poursuivaient leurs explications lorsque quelqu'un dans la foule demanda :
 - On vous entend bien, mais quelles preuves pouvez-vous nous fournir et qui attestent ce que vous nous dites ?
 Alors, le seigneur fit un geste de la main afin d'obtenir une réponse. Tous les trois répondirent par la négative. Rien n'avait été rapporté du bateau viking. Enguerrand semblait troublé par le témoignage de ces trois hommes qu'il estimait depuis toujours. Dans l'adversité, il avait maintes fois apprécié leurs qualités humaines. Il ressentait un étrange sentiment indéfinissable. Comme cette fois où, lors d'une escarmouche avec des guerriers vikings, se retrouvant seul et encerclé - il s'était battu comme un lion - les Vikings l'avait assommé et laissé agonisant. Ses soldats le croyaient mort.
Par miracle, il revint à la vie après quelques jours de torpeur. Certaines situations déjà vécues lui revenaient maintenant en mémoire. Pendant ses semaines de guerre, il en avait vu des Vikings : des vivants et des morts ; il en avait tué certains. Il avait entendu leurs cris de guerre et il connaissait bien leurs tactiques. Le silence imposait sa loi. Chacun attendait un dénouement de cette situation qui n'en finissait pas. Enguerrand prononça alors une phrase en langue nordique en direction des trois hommes. Personne ne comprit la signification de ces mots. Aussitôt, Martin, Renaud et Erwann se jetèrent sur leurs armes en criant des phrases incompréhensibles ; une grande confusion régna un court moment. Puis la foule réagissait et comprit, en un instant, qu'un mauvais sortilège avait atteint ces hommes ; les malheureux avaient certainement contracté ce maléfice sur le bateau du Viking quelques jours auparavant. Ils furent capturés, jetés en prison en attendant d'être jugés. Enguerrand ordonna à la population de rentrer chez elle.
Il allait décider du sort de ces trois hommes et jura que sa sévérité serait à la hauteur des défis qui étaient à relever. Chacun respecta les décisions du seigneur.

Vers les trois heures du matin, Enguerrand se leva et alluma une lanterne. Il la porta plusieurs fois au-dessus de sa tête de manière qu'elle soit visible à des miles et des miles. Puis il attendit une bonne heure avant d'aller délivrer Martin, Renaud et Erwann.
Déjà, à l'horizon, se profilaient les voiles porteurs de malheur.

Jacques Courtin        Février 2011      3022 mots
 
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AVRILLE AU FIL DES MOTS

L’écriture est affaire de talent. Pour cette raison, le salon des Talents Avrillais s’ouvre cette année aux auteurs de la commune et vous propose une rencontre dédicace dans le Hall du Centre Brassens
                                 
 le samedi 6 octobre 2012, de 14 à 17h.

L’objectif, au-delà de la vente d’ouvrages, reste la rencontre, l’échange.
Vous avez rendez-vous avec Jacques Courtin. Amateur de bons mots et d’histoires fantastiques, Patricia Menn qui en 2010, publiait La vie à bras le coeur, un recueil de textes poétiques racontant tour à tour l’amour, la vieillesse ou l’environnement. l’ancien journaliste Jean Goblet, l’historien Jacques Thomé, l’homme de théâtre Jean Guichard ou encore les auteurs de la bande dessinée La traversée, Robert Delanoue et Gérard Berthelot, ou l’auteur d’albums pour la jeunesse Catherine Leblanc. Ainsi que Corinne
Champagne, Sylvie Cognard, Marc Vion , Jean-Jacques Tur.
Chacun tentera à sa manière de faire partager au public son expérience et surtout son amour de l’écriture.
Allée Georges Brassens - 49240 Avrillé - Tél. 02 41 31 11 30

Au fil des mots...

les mots défilent les uns derrière les autres en ordre discipliné ; ils s'harmonisent dans une formation musicale qui joue la symphonie fantastique de Berlioz. Les sons se croisent et se décroisent pour créer du somptueux, de la force, de l'énergie et de la poésie.
les couleurs du tableau de l'artiste-peintre sautent aux yeux du visiteur ; elles lui font de l'œil et l'invitent à s'interroger. De la couleur pastel au rouge vermillon, les teintes, douces ou barbares, immenses comme des puits sans fond, apaisent ou déraillent les sens.
les mots s'enfilent comme des perles de culture ou de pacotille ; le collier ainsi créé brille de mille feux dans les yeux de l'amoureux.
les mots naissent à l'aube de la journée d'écriture et s'endorment sans bruit dans le crépuscule d'une nuit d'été. Demain, seront-ils encore prêts pour la grande aventure de la vie ?
les mots se suivent à la queue-leu-leu et se dirigent vers des territoires peuplés de personnages extraordinaires et extravagants. Ces pays existent bel et bien dans les méandres de l'imaginaire de l'artiste. Quelles contrées décrire ? Celles de tous les possibles. Quels portraits de quels personnages ? Imaginaires ou réels, dans le passé, dans le présent, dans le futur. L'écrivain n'a que l'embarras du choix.
les mots semblent se perdre dans nos pensées fugitives, évanescentes. Pourtant, les mots pensés, écrits, dits et partagés, nous fortifient d'une puissance apaisante et enchanteresse. Rien n'est plus nécessaire que les mots qui nous relient les uns aux autres ; Les grands mots, les petits mots, les mots composés, les mots croisés, les jeux de mots, les mots-clés et les mots d'esprit.

Avrillé, au fil des mots octobre 2012       Jacques Courtin


Andreas Beger, Aurélie Courtin, Jacques Courtin
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Salon Sablé sur Sarthe Avril 2012
Salon Sablé sur Sarthe Avril 2012
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C'est en bas, à droite


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